La transition écologique se fera avec les citoyens. Les changements de nos modes de vie qu’implique la lutte contre le réchauffement climatique pourront se réaliser avec l’adhésion du plus grand nombre, mais aussi avec une gouvernance permettant à chacun de se retrouver en prise avec les décisions. Du point de vue législatif, les politiques environnementales et les politiques de participation sont fortement liées. L’offre de participation a été renforcée et diversifiée ces dernières années avec, par exemple, un périmètre réglementaire de la participation du public étendu.
L’article 7 de la Charte de l’environnement énumère que : « Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement. » Pourtant, la Commission nationale du débat public (CNDP) indique que, depuis quelques années, l’association des citoyens à ces politiques et projets connaît un certain recul¹.
Il est pointé que les enquêtes publiques sont remplacées par des consultations en ligne (excluant une partie de la population), que les délais de demande de concertation ont été divisés par deux, ou encore que le droit à l’information du public est en déclin. Derrière ce mouvement, on retrouve les justifications de l’inutilité des consultations, du manque de légitimité ou d’intérêt des publics, que la priorité est à l’action et non plus à la discussion, ou encore que les décisions sont déjà connues des décideurs et « experts ». Pourtant, ce sont les projets où le débat n’a pas lieu et où les points d’alerte ne sont pas traités qui cristallisent le plus de conflits et de retard après coup.
La CNDP considère qu’aucun sujet n’est trop complexe pour des citoyens s’ils bénéficient du temps nécessaire ainsi que d’une information claire et contradictoire sur les enjeux. Malgré des volontés étatiques de moderniser le dialogue environnemental, il apparaît que les autorités publiques n’ont pas voulu donner à ces instances participatives une portée décisionnelle telle qu’une décision collective pourrait être construite. Si deux tiers des projets sont modifiés suite aux débats, ceci est moins le résultat d’un débat démocratique que d’une volonté de rendre le projet plus acceptable². La participation se déplacerait de l’espace de l’élaboration des décisions à celui de l’exécution des solutions.
La géographe de l’environnement Léa Sébastien affirme que : « La boîte à outils de la démocratie environnementale ne permet pas d’interroger le bien-fondé d’un projet ni la stratégie générale dans laquelle il s’inscrit. » La politiste spécialiste de la démocratie participative, Alice Mazeaud, fait le constat d’une institutionnalisation en « trompe-l’œil », associée à une dépolitisation des questions environnementales et climatiques³ : les outils de la démocratie environnementale seraient mis au service « d’une stratégie d’acceptabilité d’une transition écologique dont les orientations ne sont pas ouvertes à la discussion »⁴, et non de la construction de choix collectifs. Il y a alors un travail à mener pour que l’injonction législative à participer soit un outil d’approfondissement du processus démocratique.
De plus, il existe un grand répertoire de méthodes mobilisables pour consulter, concerter ou co-construire la décision avec les citoyens : réunions publiques, questionnaires adaptés à tous, ateliers participatifs dans les quartiers, budgets participatifs, expertise inversée, etc.
Côté politique de la ville, si le parallèle était réalisé avec les conseils citoyens issus de la loi du 21 février 2014 et l’apparition du terme d’« éco-construction », les constats peuvent paraître similaires. L’enjeu se situe peut-être dans la capacité des politiques publiques à inciter à la participation sans la contraindre afin de faire émerger de nouvelles formes de participation : l’incitation par du financement, comme le rapport Bacqué Mechmache le préconisait, ou la mise à disposition de moyens matériels et humains. Les habitants pourraient ainsi se saisir des sujets écologiques et y contribuer : un travail mené dans les quartiers sur l’« écologie populaire », une approche expérimentée et défendue par Fatima Ouassak, par exemple, montre une autre manière de porter l’écologie pour que les transitions soient plus justes et plus égalitaires.